La Pancadasi ou "(Traité) en quinze (chapitres)" a constamment recours à des exemples concrets et à des comparaisons suggestives. On sait que l "`orthodoxie" shankarienne s'est assez rapidement scindée en deux courants, nommés, d'après les œuvres majeures ayant inauguré ces traditions divergentes, "Ecole de Bhamati" et "Ecole de Vivarana". Dans la Pancadasi, Vidyaranya continue à manifester une certaine prédilection pour le modèle du reflet: c'est le seul brahman qui prend l'initiative de se disperser en une multitude infinie de "reflets" de lui-même. Cependant, ce n'est pas l'élément philosophique abstrait qui domine dans la Pancadasi. De vastes développements y sont consacrés aux thèmes védântiques classiques des quatre états de la conscience (veille, rêve, sommeil profond et contemplation non-duelle), des trois corps (grossier, subtil et causal) et des cinq revêtements du Soi, etc., ainsi qu'aux "Grandes paroles" des Upanishads (dont le célèbre tat tvam asi est le prototype). Dans la plus pure tradition shankarienne, Vidyaranya ne cesse de rappeler que seule la pure connaissance de soi (comme identique au brahman) conduit à la délivrance. A cet égard, il admet pleinement l'idée du "délivré en cette vie même", lequel est censé goûter dès ici bas cette "félicité du brahman" dont les joies terrestres ne sont qu'un pâle reflet. La traduction des "Quinze chapitres" que nous propose ici Madame Annie Cahn-Fung - la première dans notre langue - se recommande par sa précision et sa grande lisibilité. Grâce à elle, un des chefs-d ouvre du Vedânta non-dualiste devient enfin accessible au public fiançais curieux des choses de l'Inde.